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9 janvier 2024 – PatatorGP Team

Pourquoi l’approche du score Eco Gaming défendue par Gamesplanet, est-elle à la fois possible et nécessaire ?

Le jeu vidéo, sous sa forme logicielle, n’a que peu d’impact environnemental.

Le code source du jeu, écrit dans un langage de programmation (C++, C#, C, Java…), code qui sera ensuite compilé en un exécutable pour chaque plateforme différente, n’affecte guère la planète.

Les algorithmes du programme (variables, fonctions, comparaisons, boucles, …) et les assets (images, musiques, …) n’ont de réel impact que parce qu’ils sont écrits, stockés et exécutés sur des machines.

Ce sont ces machines qui provoquent un impact en émettant des gaz à effet de serre, directement et indirectement, notamment lors de leur fonctionnement et de leur fabrication.

Au-delà des seuls GES, les impacts sont divers et touchent également les ressources hydriques ou l’extraction de ressources naturelles non renouvelables.

Il est donc fondamental pour l’industrie du jeu vidéo de connaitre l’ensemble de l’impact environnemental des machines qu’elle utilise.
A la fois pour mieux les choisir mais aussi pour mieux interagir avec et diminuer la façon dont les logiciels les sollicitent et accélèrent leur obsolescence.

Il est encore plus fondamental que les joueurs soient informés de l’impact de leurs machines, ne serait ce qu’en ce qui concerne le coût électrique de leur fonctionnement, comme ils peuvent l’être par ailleurs pour un frigo, un lave-linge ou leur voiture électrique.

Ceci étant, si cette information est indubitablement nécessaire, est-elle accessible et disponible ?

Quelques constructeurs comme Dell, HP, Lenovo ou encore Microsoft, produisent des fiches dites PCF (pour “Product Carbon Footprint”) qui présentent l'empreinte carbone de leurs équipements, sans réellement détailler les étapes méthodologiques des évaluations.

Ces fiches contiennent toutes des camemberts colorés qui détaillent les impacts GES correspondant aux différentes étapes du cycle de vie des équipements (i.e. fabrication, transport, utilisation et fin de vie).

Les résultats présentés s’appuient sur plusieurs éléments :

-d’une part, sur la méthode dite PAIA (Product Attribute to Impact Algorithm) et l’utilisation d'une analyse simplifiée du cycle de vie définie par le MIT et Quantis pour estimer l'impact carbone et énergétique,

-et d’autre part, sur un certain nombre d’hypothèses, publiées sur chaque fiche, à savoir le poids de l’équipement, sa durée de vie estimée, son lieu d’utilisation ou d’assemblage finale et sa consommation énergétique annuelle selon la méthode TEC (pour « Typical Energy Consumption »).

Il faut noter ici que les marges d'erreur affichées par les constructeurs sur leurs fiches PCF sont toujours significativement élevées, moins à cause des données utilisées ou des facteurs d’impact qu’aux incertitudes sur le taux d'utilisation, qui peut varier de plusieurs centaines de pourcents.

Ces PCF ne sont donc qu’une synthèse monocritère, assez peu documentée, peu transparente et grevée de fortes marges d’erreur liées à des estimations d'utilisation moyennées.

Il est donc malheureusement très difficile d’utiliser les informations brutes fournies par ces quelques fiches PCF pour les croiser avec un inventaire défini de machines de joueurs, a fortiori lié à un jeu vidéo précis et à son usage propre.

Ceci étant, l’industrie du jeu vidéo, au moins en ce qui concerne le jeu sur PC, dispose d’un atout en étant organisée depuis toujours autour des « configurations système minimales » (MSR) et « recommandées », propres à chaque jeu mis sur le marché.

Ces « MSR » sont définies au travers de quelques composants clefs : le processeur (CPU), la carte graphique (GPU), la RAM et la taille du disque dur nécessaire.

Il nous a donc paru intéressant de considérer ces MSR comme les véritables « cartes d’identité hardware » de chaque jeu, et partant, comme « l’empreinte environnementale minimale théorique », spécifique à chaque jeu.

Cette approche « par composant » a été considérée comme pertinente dès 2009 par Sarah B. Boyd dans une thèse intitulée Life-cycle Assessment of Semiconductors de l’université californienne de Berkeley, qui démontrait que la fabrication des composants électroniques à forte densité représentait la majeure partie des émissions associées à la fabrication des machines.

Cette même approche a été reprise dans un excellent article de synthèse publié sur le blog de Boavitza concernant l’empreinte de la fabrication d’un serveur, qui s’attache à démontrer qu’il est possible d’effectuer une évaluation multicritère à partir de ces composants clefs.

Nous avons donc pu considérer que retenir les 4 composants principaux présents dans les MSR, était suffisamment documenté pour représenter la partie signifiante des impacts de la fabrication.

Nous avons cependant dû réfléchir aux critères qui caractérisent ces composants avec suffisamment de granularité.
Il faut savoir que le principal matériau utilisé pour la fabrication de composants électroniques est le silicium, le semi-conducteur par excellence.

Une plaque très fine de silicium (« wafer »), soumise à différentes techniques telles que la gravure, la déposition d'autres matériaux et la lithographie, permettront d’y intégrer une chaîne de microstructures. Ces microstructures sont organisées en un ensemble de « die » ou circuits intégrés.

Selon la thèse de Sarah B. Boyd précitée, c’est bien l’étape de la fabrication du wafer qui génère l’impact environnemental le plus conséquent, sachant que la surface de « die » est un des éléments dimensionnant de l’impact environnemental des composants d’une machine.
Par ailleurs, selon une étude de l’IMEC, intitulée « The environmental footprint of logic CMOS technologies », l’impact carbone de la fabrication des semi-conducteurs est fonction de la précision de gravure : Plus la taille de gravure est fine, plus l’impact augmente.

C’est donc également le procédé de lithographie utilisé, particulièrement en prenant en compte le niveau de précision de gravure, qui pourra rendre compte de la granularité de cet impact (par exemple « 14 nm » désigne le procédé de fabrication des semi-conducteurs qui succède au procédé 22 nm et dont la taille des cellules SRAM est presque réduite de 50%).

Ainsi, sur les conseils de Resilio, outre le procédé d'encapsulation et la taille de la carte, nous avons pu retenir les critères pertinents suivants :

i) Pour le CPU, le procédé de lithographie utilisé (en nano mètre) et la taille du die (en mm2),
ii) Pour le GPU, la taille du circuit imprimé (PCB en cm2) et, là encore, la taille du die,
iii) Pour la RAM, sa taille (en GO)
iv) Et pour les disques durs, leur taille, leur type (SSD or HDD) et, pour les disques SDD, la technologie retenue (SLC, MLC, TLC ou QLC).

Une fois définies les caractéristiques clefs de nos composants, permettant d’obtenir une granularité suffisante entre les différents produits du marché, encore fallait il ensuite être capable de collecter les informations nécessaires pour relier les composants affichés dans les MSRP à des facteurs d’impact pertinents.

L’identification et la collecte d’information pertinente, consistant à référencer dans des bases de données dédiées le procédé de lithographie, la taille du die ou du circuit imprimé de tous les produits du marché a demandé des efforts significatifs à Gamesplanet et a nécessité la conclusion d’accords avec des tiers.

Le lien entre les données ainsi réunies et les facteurs d’impact s’est fait au travers de la base de données Negaoctet.
NegaOctet est un consortium de différentes entités qui ont travaillé sur une norme pour mesurer l’impact environnemental des services numériques. Leur base de données (update de février 2022) contient 1 500 composants et équipements classés selon quatre niveaux de granularité. Chaque pièce d'équipement est associée jusqu'à 30 facteurs d’impacts, de l’épuisement des ressources abiotiques au réchauffement climatique et à l’eutrophisation.

A nouveau sur les conseils de Resilio, ce sont ces facteurs d’impact qui ont été retenus.

A noter que les hypothèses pour la localisation géographique sont primordiales.

D’une part parce que le calcul de la consommation d'énergie nécessaire à la fabrication varie selon l'état dans lequel est extrait ou fabriqué le composant sujet de l'étude, et d’autre part parce que les paramètres de conversion dépendent également de la région géographique choisie.

Cette approche n’est évidemment pas exempte de défauts : Elle est limitée aux impacts multicritères de la fabrication seule et fait en outre l’impasse sur certains postes, jugés mineurs (et souvent présentés comme tels par les constructeurs), que sont le packaging, le transport ou encore la fabrication du châssis de la machine.

Il faut ensuite être en mesure de la coupler avec une estimation correcte de la phase d'utilisation du composant pour avoir un impact global, ce qui n'est pas une affaire aisée.

Mais soyons clair : Elle s'intègre plutôt bien aux usages existants du jeu vidéo (et du logiciel dans son ensemble) en s'appuyant sur les MSR et permet de mesurer de manière transparente et documentée l’impact de la fabrication de tous les PC du marché et partant de tous les jeux PC, quels que soient les fabricants ou les éditeurs et la disponibilité ou non de fiches PCF.

Elle offre donc une indépendance complète pour un travail sérieux d’affichage environnementale, telle que proposé avec notre score Eco Gaming, ce qui permet d’apporter une solution à tout ceux qui estimaient urgent de ne rien faire compte tenu d’un sujet jugé trop compliqué et soit disant impossible à traiter autrement qu'avec des moyennes.

Score: 6
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